Le budget européen : les États contributeurs nets sur le point de jeter l’éponge

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la situation du budget européen est loin d’être résolue. La question qui se pose est la suivante : comment (bien) distinguer les pays contributeurs des pays bénéficiaires ? La non-réponse à cette question centrale nourrit le populisme et constitue, à ce titre, un obstacle majeur à la poursuite du projet européen. Aujourd’hui, les États contributeurs nets veulent payer moins, sachant que le budget actuel, qui s’étale sur la période de 2014 à 2020, est déjà très modeste. Vers une nouvelle impasse européenne ?

Contributeurs nets : l’Allemagne et l’Italie sont loin de devant

Avec la crise de la dette souveraine dans la zone euro, l’Irlande, la Grèce, l’Italie et les deux pays de la péninsule ibérique ont été accusés de gaspiller les ressources financières de l’UE et de vivre bien au-dessus de leurs moyens, au détriment de l’Allemagne et des autres États contributeurs budgétaires nets. Pourtant, on peut penser aux soldes financiers des États membres non seulement en termes de budgets, mais aussi en termes de comptes courants.

Dans ce contexte, les contributeurs nets sont les États membres qui reçoivent plus d’importations du marché unique qu’ils n’exportent. Cette variable peut être appréhendée par les contributions nettes moyennes au budget de l’Union en proportion du produit national brut. Aujourd’hui, l’écart entre l’Allemagne et les différents pays jugés « bénéficiaires nets » se creuse dangereusement. Au final, deux États membres « contributeurs nets » sortent du lot. Il s’agit de l’Allemagne et de l’Italie. Seulement voilà : ces contributions nettes sont inférieures à un demi-point de PIB. Athènes et Lisbonne apparaissent comme les principaux bénéficiaires nets du budget.

Quid des ressources propres des Européens ?

Le budget de l’Union Européenne est financé par des ressources propres et des ressources des États membres. Les fonds propres comprennent notamment les droits de douane perçus par l’Europe qui constituent une grande partie du budget du Vieux Continent. Transférer le financement de l’UE des ressources des États membres vers les ressources propres de l’UE permettrait de calmer les ardeurs des contributeurs nets, en particulier si l’UE prélevait des impôts que les États membres ne pouvaient percevoir et réduisait ainsi les contributions « individuelles » des États membres.

Dans l’UE, les impôts sur le travail et la consommation ont augmenté à mesure que ceux sur le capital ont été réduits. Avec la libéralisation internationale des mouvements des capitaux, les États membres s’abstiennent de prélever des taxes sur les transactions financières réalisées par les grandes sociétés multinationales, par crainte de fuite de capitaux ou de délocalisation dans des pays plus avantageux. Au contraire, ils ont réduit les impôts sur le capital pour attirer les investissements de portefeuille et les investissements directs étrangers (IDE), ce qui a conduit à un dumping fiscal puis à une certaine « mendicité » entre voisins.

Si les taxes sur les transactions financières internationales et les sociétés multinationales étaient appliquées à l’échelle européenne, les investisseurs et les entreprises ne choisiraient plus l’État membre de l’UE offrant les plus grands avantages fiscaux, puisqu’ils paieraient le même impôt partout. La décision serait plutôt d’avoir, ou de ne pas avoir, accès au marché unique de l’intérieur. Étant donné que l’UE est la deuxième plus grande économie du monde, les coûts associés à une telle décision seraient suffisamment élevés pour qu’il soit préférable pour ces investisseurs de payer un peu plus d’impôts pour opérer dans l’UE.

Et si l’Allemagne était le vrai bénéficiaire de l’UE ?

En ce qui concerne le marché unique de l’UE, le couple Lisbonne-Athènes est celui qui importe le plus proportionnellement à son PIB cumulé. L’Italie est également dans ce cas. De l’autre côté, L’Allemagne, l’Espagne et surtout l’Irlande s’imposent comme les plus grands exportateurs intracommunautaires.

En somme, le Portugal et, dans une moindre mesure, l’Italie sont des contributeurs nets à l’UE. Dans le cas du pays lusitanien, les contributions nettes via le marché unique l’emportent sur les avantages nets via le budget.

Dans le cas de l’Allemagne, qui reste la plus grande économie de la zone euro, le bénéfice net tiré du marché unique est presque neuf fois supérieur à la contribution nette au budget de l’UE ! Ces données donnent un nouvel angle sur la question de savoir qui paie le plus dans l’UE et qui reçoit le plus. N’oublions pas, pour compliquer davantage la chose, que le fait d’être un contributeur net peut impliquer une augmentation de la dette extérieure.