L’Europe verte et responsable : un rêve toujours aussi lointain

De la France à l’Espagne, de la Finlande à l’Estonie, les dirigeants européens se bousculent pour répondre à la montée en flèche du soutien aux partis verts et à l’inquiétude croissante du public quant aux conséquences possibles du changement climatique mondial.

La course à l’objectif « zéro émission » à l’horizon 2050

Les Verts ont fait un bond en avant lors des élections au Parlement européen le mois dernier. C’est simple : près de la moitié des électeurs européens ont déclaré que le changement climatique était leur principale préoccupation. Les sondages d’opinion en Allemagne placent désormais les Verts devant le Parti chrétien-démocrate de la chancelière qui, avec son partenaire dans la coalition gouvernementale du pays, s’efforce d’affiner sa politique climatique. En Grande-Bretagne, la première ministre sortante, avec l’appui de la plupart des candidats conservateurs en lice pour la remplacer, a annoncé un objectif extrêmement ambitieux de réduction des émissions de carbone. Elle s’est engagée à atteindre l’objectif de zéro émission nette de carbone d’ici 2050, faisant de la Grande-Bretagne la première grande économie à viser aussi loin. La première ministre sortante a rappelé le rôle de chef de file de son pays en matière d’innovation pendant la révolution industrielle, avant de s’engager vers une forme de croissance plus propre et plus verte.

D’autres pays européens emboîtent le pas et certains pays plus petits, notamment en Scandinavie, s’apprêtent à passer au zéro gaz à effet de serre avant 2050, même s’ils n’ont pas encore rendu leurs objectifs juridiquement contraignants. Mais la mise en œuvre d’une action radicale pour le climat sera beaucoup plus compliquée et plus difficile que ne le laissent entendre les politiciens, et il n’est pas certain que les Européens soient prêts à faire les sacrifices nécessaires pour un avenir sans carbone.

Les Européens ne sont pas prêts à sacrifier leur pouvoir d’achat pour l’écologie

Dans un sondage d’opinion réalisé en Grande-Bretagne, les répondants ont déclaré qu’ils n’étaient pas disposés à contribuer au financement de la promesse du gouvernement d’atteindre l’objectif de zéro émission, qui coûtera au pays entre 30 et 55 milliards de dollars selon les estimations. Cela représente environ 1,5 à 2,5% du Produit Intérieur Brut de la Grande-Bretagne. Certaines estimations vont encore plus loin. Le ministère britannique du Trésor évoque un coût global de 95 milliards de dollars par an pour l’élimination des combustibles fossiles. Les coûts devront être partagés entre le gouvernement, les propriétaires, les producteurs et les consommateurs. Mais si l’opinion publique britannique est favorable à l’action climatique, elle semble moins disposée à en supporter les coûts. Lorsqu’on a demandé aux répondants s’ils appuieraient l’idée que le gouvernement augmente les impôts pour financer sa promesse, 39% ont répondu qu’ils ne le feraient pas, et seulement 32% étaient prêts à payer plus d’impôts. Et les personnes interrogées se sont montrées particulièrement hostiles à l’idée de réduire les services publics pour financer les projets verts. Seulement 8% des répondants étaient en faveur d’une telle mesure, et 79% s’y sont opposés.

La désindustrialisation de l’Europe a aggravé le réchauffement climatique par l’import

Dans la presse spécialisée, on pense même que les coûts qui seront engagés par la Grande-Bretagne pour atteindre cet objectif de zéro émission seront beaucoup plus élevés. La presse cite le gouvernement néo-zélandais qui envisage également d’adopter un point de référence pour la même échéance. Le pays estime qu’il pourrait avoir à débourser jusqu’à 20% de son Produit Intérieur Brut pour se débarrasser des combustibles fossiles d’ici trois décennies. D’autres experts en énergie avertissent que l’action climatique n’est pas suffisamment réfléchie par les gouvernements européens paniqués et pourrait avoir peu d’effet sur la réduction globale du réchauffement climatique. L’histoire du dernier quart de siècle montre que l’Europe s’est désindustrialisée et qu’elle a échangé sa production domestique contre des importations, ce qui a aggravé le réchauffement climatique.

Ce point a également été soulevé par des militants du climat et des groupes environnementaux qui, tout en se félicitant de l’action en faveur du climat, affirment que les différents plans européens ne tiennent pas compte de l’externalisation de la fabrication et tentent un tour de passe-passe. Ils reprochent également aux gouvernements européens de compter sur les crédits de carbone internationaux, où un pays peut payer pour des réductions ailleurs au lieu d’émissions nationales pour atteindre ses objectifs. Selon les ONG qui œuvrent en faveur de l’environnement, les Européens ne font que déplacer la fabrication vers l’Asie et les pays en développement, où la main-d’œuvre est moins chère et où les biens sont produits avec des émissions de carbone élevées, notamment à cause de l’électricité produite par le charbon.